Le
pentecôtisme protestant naîtra principalement d’une spécialité
bien américaine : les « revivals » ou réveils, qui consistent
en fait en des rassemblements de foule dans une ambiance de meeting en
vue d’une évangélisation de masse. On en trouve les précurseurs
chez Charles Finney (1792-1875), Dwight Moody (1837-1899), Bill Sunday
(1862-1935), qui, tous, laissèrent à leur mort des fortunes
considérables, car, fort heureusement, les dons contribuaient au pardon
des péchés[68].
Les « revivals » tireront bénéfice de l’avènement des grands
médias. Ainsi, Billy Graham utilise-t-il la télévision dès 1951,
avant de devenir le chapelain officieux du président Nixon. Né en
1918, Oral Roberts, d’abord pasteur dans une église pentecôtiste (il
s’agit ici d’une « dénomination » protestante), guéri «
miraculeusement » de la tuberculose, entreprend de « gagner un million
d’âmes pour le Christ » chaque année et, à cette fin, achète des
tranches horaires à la télévision à partir de 1954. Il comptabilise
les « sauvés », et aussi les dons reçus, et « guérit » les
malades par imposition des mains; Jim Bakker est un autre de ces
spécialistes des « revivals »[69].
Ces pratiques ont été dénoncées comme relevant du charlatanisme et
de l’escroquerie, mais leur succès vient de ce qu’elles
bénéficiaient à des foules qui y trouvaient des compensations morales
à des situations sociales trop modestes.
C’est
parmi ces « revivals », ces assemblées de prière où se manifestent
l’enthousiasme, l’émotion, la sentimentalité, la spontanéité et
l’expérience spirituelle, que va naître le Pentecôtisme. Oral
Roberts, lui-même, aura reçu en 1936 le « baptême dans l’Esprit
saint » et se sera mis à « parler en langues »[70].
A l’origine, un pasteur méthodiste, Charles Parham, interprétant à
sa façon le Nouveau Testament (toujours le « libre examen »), croit
comprendre que l’efficacité de la prédication est liée à une
effusion de l’Esprit : le « baptême dans l’Esprit », obtenu
par imposition des mains. Parham pratique .donc dans le groupe qu’il a
réuni le « baptême dans l’Esprit » dont l’efficacité se
manifeste, le 31 décembre 1898, par l’apparition du charisme le plus
typique : le « parler en langues »[71].
A partir de là, le mouvement pentecôtiste va s’étendre, sous l’impulsion,
en particulier, d’un pasteur noir de Los Angeles : John Seymour.
Il se différencie des « revivals » par un nouveau type de relation
avec l’Esprit saint qui n’est pas sans rappeler la vieille hérésie
montaniste. Les diverses « églises » protestantes
institutionnalisées se montrent d’abord très réticentes, voire
violemment hostiles, à ce mouvement où leurs fidèles se mélangent
indifféremment. Puis, après cinquante années d’opposition, elles se
sont résignées, devant l’ampleur du mouvement, à lui faire une
place vers 1955.
Parallèlement
au développement du pentecôtisme américain, et indépendamment de
lui, s’est répandu en Europe un autre pentecôtisme protestant. Un
mineur du Pays de Galles, Evan Roberts, poussé par l’évangéliste
Seth Josué, s’est mis à prêcher. Son enseignement touche la
Scandinavie, puis la Hongrie, la Pologne, l’Allemagne.
La
France aussi, dès 1929. En 1934, un congrès mondial de cette branche
pentecôtiste réunira 10 000 participants à Paris[72]. |